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Le blog de Susanna Huygens
Articles récents

Je regarde voler mon rêve, papillon

21 Février 2024 , Rédigé par Parmentier Monique

@ L’illustration Noël 1930 - Miniature persanne du XVIe siècle

Et, poète royal en robe vermillon,
Autour de l’éventail fleuri qui l’a fait naître,
Je regarde voler mon rêve, papillon.

Albert Samain, Au jardin de l'infante

Je m'absente de plus en plus. A cela plusieurs raisons. La première, il m'a fallu renoncer à mon rêve de sud. Le marché de l'immobilier y est comme partout, tant en locatif qu'à la vente, proche du néant. Le locatif à cause de la rareté des biens et du comportement des agences immobilières, inacceptable à mon âge, que de la vente où les prix sont abusifs et où une fois encore les agences prennent les acheteurs pour des idiots. Je n'avais pas envie de m'énerver plus longtemps. Cela faisait deux ans que je cherchais. Il m'a donc fallu imaginer ma retraite autrement. Par ailleurs, cette même retraite, ou du moins le suivi de mon dossier m'a demandé un peu de temps (mais cela dit, cela c'est fait en à peine un peu plus d'un mois et c'est réglé avant même ma date de départ. Donc me voilà rassurée).

@ DR - Decoupis victorien

Imaginer ma retraite autrement, cela veut dire, que vais-je faire de ce temps pour le remplir au mieux et appréhender cette période de la vie. D'abord avant ma date effective, faire tous mes bilans de santé, tant que j'ai ma mutuelle entreprise, ensuite trouver des activités réalisables dans un espace différent, qui n'existe pas encore vraiment (Dès que je serais à la retraite, je vais voir si je peux m'aménager un coin à moi, un bureau / véranda. Ces travaux m'occuperont donc un peu). Mes activités tourneront moins autour de mon blog, vous l'avez compris. Je vais pour le plaisir me constituer un petit bout de bibliothèque idéale, en partant en quête de ces beaux livres illustrés de l'époque victorienne, qui me font rêver depuis l'enfance, mais l'essentiel de cette quête se fera probablement via Internet... Probablement, car cela fait partie du rêve, retourner au Royaume-Uni et en Irlande, pour y visiter les libraires (entre-autre). Et sinon, que deviendra l'écriture... Elle passera plutôt par un joli carnet, relié sur le mode Olive Fairy book. Petit carnet très personnel, pour lequel j'ai encore besoin de trois petites choses pour y travailler. Il sera aussi en partie constitué de ces chromos et "découpis" victoriens, au charme onirique. Je suis déjà pour cela en contact avec deux pages sur Etsy (Chatelainefinds et Majilly, mais j'en ai repéré d'autres). J'ai aussi retrouvé quelques unes de ces petites merveilles, dans les souvenirs que nous a laissé ma grand - mère.  J'ai repéré également et m'en suis déjà procuré un, les numéros hors série de Noël de l'Illustration, une superbe revue française née durant le XIXe siècle et disparue juste après la seconde guerre mondiale. Une revue qui disposait de moyens d'impression, lui permettant de reproduire des oeuvres d'art, dont les livres actuels ne disposent plus.

@ DR - chromos fin XIXe siècle

Certains vont me dire, "mais comment pouvez-vous vous montrer aussi légère, dans ce monde qui va mal ?". Comme je l'ai déjà dit, je me refuse ici ou sur mon compte Instagram d'aborder, tous ces sujets qui me rappelle la violence et la vulgarité d'un monde où la haine se répandent de plus en plus, alors que la poésie tente désespérément de survivre. Alors, je m'y réfugie, consciente que de moins en moins de gens ont envie de savoir qu'elle est là, à portée d'esprit, prête à les libérer et à appréhender le monde qui les entoure, autrement et ainsi peut-être à retrouver l'humanité qui s'est perdue.

@ DR - Decoupis victorien

Evidemment, je vais reprendre le chemin de la lecture. Et puis, mais plutôt à partir de l'année prochaine, les jeux olympiques venant désorganiser les transports et les hébergements, un peu voyager et retourner dans mon sud. 

@ L’illustration Noël 1930 - Miniature persanne fin XVIIe siècle

Voilà cher lecteur. Bien sûr je reviendrais, lorsqu'un livre ou quelque chose m'inspirera ce bref instant de poésie, que j'aurais plaisir à partager avec ceux qui comme moi, le recherche. Ma quête, aussi éperdue soit-elle ne changera pas, elle sera toujours celle d' un once upon a time qui peut donner à espérer, un tout petit peu, juste ce qu'il faut, pour qu'avant de s'endormir vienne à nous ce papillon étoilé et chamarré venu de cet autre monde, celui des rêves.
Par Monique Parmentier

@ L’illustration Noël 1930

Une clairière
fière de sa lumière
la meute des regrets
désorientée
des riens joyaux
d’un bonheur quotidien
la Mort étonnée
de tant de sérénité
du chant de l’oiseau
riposte inconsciente
au Temps
du rire des enfants
malgré le sang versé
et les larmes
des amoureux
aux étreintes vénitiennes
indifférents à la haine
dévorante

Kamal Zerdoumi, 2020

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Destination Orion : voyage vers les confins des origines

4 Janvier 2024 , Rédigé par Parmentier Monique Publié dans #Sciences

@ Olivier Berné - Dunod

Comme vous le savez, le James Webb space telescope est parti un 25 décembre... Formidable Père Noël. C'était en 2021, il y a donc deux ans. Je me souviens pour l'avoir suivi en direct, de l'émotion ressentie durant toutes les opérations du lancement. Comme beaucoup de personnes passionnés d'Astronomie, j'avais suivi les déboires rencontrés lors de son développement qui a duré près de 25 ans. 

Depuis son déploiement, les résultats ont commencé à arriver auprès des scientifiques engagés sur le projet et pas que de magnifiques clichés, que vous avez pu voir circuler, mais aussi des analyses sur des instruments d'une extrême précision. Car le James Webb est un prodige de technologies. Il est en fait, et désormais en orbite, il le prouve, un concentré de ce que l'humanité peut faire de meilleur, dont un authentique travail de collaboration internationale, dans un contexte pourtant hautement concurrentiel, puisque les scientifiques courent après les financements et pas qu'en France ou aux USA.

Ce livre, Destination Orion, voyage à bord du télescope James-Webb, nous relate un des nombreux projets scientifiques retenus pour bénéficier des services du télescope et de ses instruments embarqués. Si la cellule du projet d'observation de la nébuleuse d'Orion est internationale dans sa composition, ce sont des scientifiques français qui l'ont monté, sous la direction d'Olivier Berné, l'auteur de ce livre.

@ Olivier Berné

Directeur de recherche au CNRS, à l’institut de recherche en astrophysique et planétologie de Toulouse, Olivier Berné est un spécialiste des nébuleuses où se forment les étoiles. Celle d'Orion, située dans la "proche" banlieue de notre système solaire (1300 années lumière tout de même), était donc parfaitement indiquer pour en apprendre davantage sur la formation de notre propre système solaire.

On ressort de la lecture, épatée par toute la ténacité de ceux qui ont cru à l'absolu nécessité d'aller jusqu'au bout du James Webb et émerveillée par ces premiers résultats consolidés, contrairement à certaines annonces fantaisistes des médias.

Et des questions il vous en viendra à la lecture de ce livre. Car si demain, notre planète devenait invivable par la victoire des andouilles dangereux aux différentes commandes des états comme du reste, soyez en certains et c'est ce que la science tend à confirmer jour après jour, il n'y aura pas de plan B, pas de planète B.

Image credit : NASA/ESA

Ce n'est pas seulement ce qu'implique la découverte d'une nouvelle molécule qui est elle scientifiquement importante, c'est aussi une fois de plus le processus de naissance des systèmes planétaires qui se confirme. 

Image credit : NASA/ESA

Et l'on se rend compte que les enchaînements conduisant à l'apparition de la vie et à son développement, relève non pas seulement d'une logique où des éléments s'additionnent naturellement, mais plutôt à des rencontre entre des briques qui dans certaines circonstances se combinent de telles manières qu'un jour, l'évolution aboutit à la vie dite intelligente. Il aura fallu pour cela plus de 4 milliards d'années. Sommes - nous seuls dans l'univers ? Ce livre ne réponds pas à cette interrogation. Aucune réponse n'y a encore été apporté. Mais ce n'est guère plus improbable que d'avoir des voisins très lointains (dans l'espace et le temps). 

En attendant, comme le dit Eric Lagadec, autre astrophysicien, un peu plus connu du grand public, mais tout aussi sérieux derrière son ton humoristique " La planète Terre est la seule connue avec de "la vie intelligente”, de la bière et les crêpes de ma mère, alors prenons soin d'elle." Et en attendant, précipitez-vous pour acquérir, ce formidable roman d'aventures. Voici un livre qui a trouvé sa place dans ma bibliothèque idéale.

Image credit : NASA/ESA

 

Par Monique Parmentier

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Vœux 2024

3 Janvier 2024 , Rédigé par Parmentier Monique Publié dans #Divers

@ DR

En retard, je suis. Mais avec l'hiver et la pluie, je me blottis dans la lecture. Et je l'avoue, l'actualité ne m'a guère donner envie d'en passer par des vœux qui sonneraient faux. J'ai résolu, il y a bien longtemps de ne jamais aborder ici, des sujets d'actualité. Tout est si laid, d'une cruauté et d'un cynisme sans nom autour de nous, qu'il n'est nul besoin de rajouter des opinions provoquant en retour, de toute manière des insultes avec ceux qui ne les partageraient pas.

De tout coeur, je souhaite à mes visiteurs une belle et douce année 2024. En espérant, que malgré ce monde en souffrance, vous parviendrez à vous créer de merveilleux recoins d'harmonie et de petits bonheurs.

Par Monique Parmentier

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Ségurant, le chevalier au dragon, ""La route se poursuit sans fin"

27 Novembre 2023 , Rédigé par Parmentier Monique Publié dans #Poésie et Littérature

@ Emanuele Arioli Les Belles lettres

Dans un monde où les réseaux sociaux, la médiocrité, la méchanceté sont la devanture des magasins médiatiques et politiques, des chercheurs, des artistes, des libraires et éditeurs... Mais aussi des gens ordinaires, poursuivent la quête du merveilleux et du beau.

Ma bibliothèque idéale, s'enrichit toujours, y compris d'ouvrages "contemporains".

@ Emanuele Arioli Les Belles lettres

Je reviendrais très vite sur l'exposition à Landernau,  consacrée à John Howe qui touche à sa fin, et combien je regrette de ne pouvoir m'y rendre. Mais pour compenser, je viens de me commander le catalogue. Des interviews diffusées de ce fabuleux et romanesque illustrateur , (y compris celle de C28 sur Arte), sont également diffusées sur le net, toutes plus passionnantes les unes que les autres.

Mais il y a quelques mois, l'annonce du Festival d'archéologie de Narbonne, a attiré mon attention sur un documentaire qui y a été diffusé en avant première et qu'Arte à son tour nous a offert, ce samedi 25 novembre.

Un jeune chercheur d'origine italienne, Emanuele Arioli, vient de publier le fruit de ses recherches sur un (décomposé en plusieurs "éclats") manuscrit oublié de la Table Ronde, Ségurant, le Chevalier au dragon.

@ Emanuele Arioli - Les Belles lettres

Une aventure littéraire passionnante et onirique, dont on ressort totalement émerveillée. Non seulement, parce que l'histoire de ce chevalier est belle, mais parce que les manuscrits qui nous relatent son histoire, ont tout du trésor dont rêve tout chercheur, mais aussi parce que sa quête, nous renvoie à nos errances et questionnements.

Reconstituer l'histoire de Ségurant, à partir de manuscrits perdus, en partie détruit en raison de leurs liens avec les Prophéties de Merlin, manuscrit que le Concile de Trente, a tenté de faire disparaître, a donc été un défi à relever. Telle une chimère, à l'image du dragon de Ségurant, l'histoire du chevalier s'est amusée à un jeu de cache cache, qui n'est jamais venue à bout, malgré ses fausses pistes et ses silences désespérants, de la patience du chercheur.

 

@ E Arioli - Les Belles Lettres - Ségurant manuscrit de Turin

Sa ténacité a donné sens à cette quête qui est venue s'offrir à lui, dans la pénombre et le silence de la bibliothèque de l'Arsenal (BNF) et de toutes celles détenant des bribes de l'histoire. 

Si Emanuele Arioli, est un jeune acteur au regard ténébreux, sa formation universitaire sans faille, en fait avant tout un médiéviste talentueux. Il entreprend ses recherches non seulement avec une véritable méthodologie, mais en sachant, face aux difficultés ou à la nécessité de valider ses hypothèses, s'appuyer sur des ressources universitaires des plus sérieuses. Il nous dévoile ce mystérieux héros, qui devient au fur et à mesure de l'avancée de ses travaux, une quête de sens, devenant son coeur littéraire.

 

@ E Arioli - Les Belles Lettres - Armoiries de Segurant

Emanuele Arioli, a donc permis de retrouver, au sein des bibliothèques européennes, un de ces preux chevaliers dont la quête du Graal semble à jamais inscrite dans la mémoire populaire. Mais Ségurant, victime d'une malédiction, va se laisser détourner de cette quête, pour poursuivre un dragon chimérique

En partant d'un large extrait découvert dans un manuscrit du XIVe siècle, mais dont la narration des aventures connaît ses premières versions en Italie au XIIIe siècle, Emanuele Arioli, nous invite à suivre un voyage onirique, celui d'une recherche, loin de l'image poussièreuse que certains attribuent au travail en bibliothèque.

Plus que jamais, Ségurant et son double universitaire, viennent nous rappeler combien les aventures de la Table Ronde sont un enchantement, nous ramenant sur les terres d'un idéal courtois et fantasmagorique, voir fantastique. Si Ségurant, apparaît avant tout comme un preux chevalier, dont un dragon maléfique devient la quête, petit à petit ses aventures et celle du chercheur,  que les manuscrits fuyants, voir réduits à quelques pièces en cendres, défient régulièrement, deviennent les miroirs de l'âme.

@ E Arioli - Les Belles Lettres

Durant tout le documentaire, je me suis reconnue alors que j'entreprenais des travaux de recherche à la BNF. Les lumières tamisées, le soin apporté aux manuscrits anciens que l'on feuillette avec beaucoup de précautions, l'étonnement qu'ils peuvent nous procurer et cet étrange sentiment d'ailleurs. Que ce soit dans le documentaire où dans le livre, c'est une invitation aux voyages, loin du réel, que Ségurant nous révèle, un don pour l'extraordinaire, pour le chemin à suivre toujours et qui plus que le dragon est l'objet de la quête.

Alors pour un Noël aux sortilèges envoûtants, afin de maintenir éveiller cette flamme d'une enfance où tout était, comme au moyen-âge possible, Ségurant, le chevalier au dragon, d'Emanuele Arioli, est certainement le meilleur choix.

Les Editions Les Belles Lettres nous offrent l'édition en français  moderne, tandis que les éditions Honoré Champion, celle en ancien français. Un travail particulièrement beau, pour celle des Belles Lettres qui est une édition de poche, avec la reproduction d'enluminures qui accompagneront le lecteur dans l'errance poétique du chevalier et de son barde contemporain. Il existe également une version en bande dessinée chez Dargaud, pour une première initiation, destinée aux adolescents et adultes, et devrait enfin venir une BD destinée à un public plus jeune aux Edtions Seuil Jeunesse. Un seul regret, l'inaccessibilité de l'étude issue de la thèse pour l'instant, en espérant toutefois sa publication et sa plus large diffusion pour des lecteurs qui voudront en savoir toujours plus. Mille e mille volte grazie à Emanuele Arioli pour ce travail étourdissant et d'une telle beauté et poésie.

@ E Arioli - Dargaud

"La route se poursuit sans fin
Qui a commencé à ma porte
Et depuis m'a conduit si loin
Que depuis je la suis où qu'elle m'emporte"
JRR Tolkien

Par Monique Parmentier

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L'extraordinaire histoire de la Villa Alice : le sel de la vie

18 Novembre 2023 , Rédigé par Parmentier Monique Publié dans #Divers, #Poésie et Littérature

Villa Alice - @ Maële Vincensini - Locus Solus

Il est arrivé. Je l'attendais. Il est arrivé alors que l'automne, sous une pluie froide et continue, vient me conforter dans ce besoin de me blottir, sous un plaid chaud. Il est arrivé et  je l'ai longtemps regardé. Il est si beau. Oui, il est simplement beau. Sur sa reliure, une maison, une belle maison, sobre et ancienne, sans fioriture, juste quelques plantes grimpantes et en pots. Une maison aux volets ouverts, entouré d'un filigrane doré... Comme un livre de contes, la porte fermée, nous invite à l'ouvrir. Irréel, et pourtant si vrai, il attend dans mes mains que je l'ouvre. Il attend que quelqu'un à haute voix disent, "il était une fois". Il fleure bon les livres de mon enfance. Je vais l'ouvrir, et me laisser emporter, par l'histoire que je connais pourtant déjà un tout petit peu, ou que je crois connaître, car je suis Maële Vincensini, son autrice, depuis plusieurs mois sur Instagram.

La villa Alice, ce n'est pas seulement une histoire, une histoire vraie qui ressemble à un conte, c'est un peu aussi, mais pas seulement, la maison de famille dont nous rêvons tous. Mais aurions nous eu le courage, avant d'en faire nôtre, d'en accepter et d'en raconter l'histoire, pour en assurer la transmission de l'âme, de son âme si belle ? Maële et Renaud, ont su la percevoir et réanimer ses braises.

Je ne peux que vous inviter, à vous procurer, L'Extraordinaire histoire de la Villa Alice. Vous y découvrirez combien la mémoire de "ceux qui ne sont rien" est tellement plus belle que la légende dorée de nos stars médiatiques.

Ma maison familiale dans les nuages en Belgique @ MParmentier

Au coeur du Finistère Maële et son mari Renaud, ont découvert leur maison enfouie sous une épaisse végétation, abandonnée, ouverte à tout vent. Ils ont su que cette maison serait la leur, mais on su aussi immédiatement, que son histoire deviendrait la leur, cette ligne conductrice qui permet de s'enraciner. Alice, sa propriétaire, une belle dame très âgée accepta de la leur vendre, à une seule condition, que cette maison soit une maison de famille, une maison pour des enfants et des parents. Elle ne pouvait pas, cette belle dame, si seule, mieux choisir ceux à qui par le biais d'une vente, elle allait transmettre son bien. Au travers des objets si modestes, ceux du quotidien de plusieurs générations, Maële parvient à retrouver l'histoire d'une famille désormais pour partie éteinte, voir ignorante de son passé. Elle transmets ici, à son tour et ce faisant nous réapprend le sens de la mémoire et le sens de cette vie qui passe si vite, oui si vite. Et alors même que la mémoire d'Alice s'éteint progressivement, avant que de disparaître, si bien entourée, grâce à Maële, Renaud et leurs deux enfants, elle retrouve, ses derniers cousins, si lointains dont le temps avait effacé les liens.

Du XIXe siècle à aujourd'hui, cette maison, nous murmure, non seulement l'histoire de famille qui l'a bâti, mais aussi la nôtre. Celle de nos familles, ceux qui ne sont rien et qui furent sacrifiés sur les champs de batailles de la grande boucherie de 14/18, et de la résistance durant la Seconde guerre mondiale et du courage toujours de ceux qui ne sont rien, qui traversent la monstruosité de ces conflits et de leurs drames, et entre ces deux moments où la grande histoire côtoie celle du quotidien, le sel de la vie : les grèves pour survivre, les difficultés du quotidien, mais aussi les joies de l'apprentissage, d'une école apprenante et empathique. Chère Maële, j'ignore si vous me lirez, mais merci (mille e mille volte grazie) de m'avoir donné envie de relire les mémoires de mon grand-père, de regarder les photos anciennes que je détiens, de jeter un coup d'oeil sur un arbre généalogique qui ne me disait plus rien, depuis que mon grand-père, nous a quitté. Oui, Alice avait raison "ça passe si vite". On en prend conscience, un jour, lorsque vient le jour où l’on se demande ce que l'on a fait de tout ce temps.
Alice et Maële, vous invite à vous construire une mémoire, afin de la transmettre. En la lisant, vous retrouverez peut-être ce qui fait tant défaut à notre époque, ce besoin de partager la beauté des coeurs. Grâce à Maële et sa si douce et généreuse famille et à Alice, la flamme devenue si ténue de l'âme de la Villa Alice, a retrouvé sa luminosité. C'est à ranimer cette même flamme qui sommeille en vous que ce livre participera. Ce livre nous parle d'émotions, de rires, de larmes, de joies, de peines et de douleurs. Ce livre est la vie, la vie qui passe si vite. Faites de petits riens et de beaux et parfois terribles souvenirs.

J’aimerais ici remercier, la jeune maison d’édition indépendante bretonne Locus Solus, qui n’a pas hésitée à produire un si beau livre, un livre qui est fait pour faire scintiller votre bibliothèque de rêve. Et lorsque l'on regarde leur catalogue, ont peut y découvrir d'autres merveilles, comme autant de tableaux dans une galerie d'art, prêt à prendre vie lorsque les mots seront portés par la parole des lecteurs. Un travail d'édition remarquable, à suivre pour ensoleiller nos longues journées d'hiver et redonner aux parents le goût de l'histoire contée  avant de s'endormir, aux enfants (petits et ... grands) récalcitrants.

N'hésitez pas, à entreprendre cet étrange et fascinant voyage en si belle compagnie.

@ Maële Vincensini @ Locus Solus

Par Monique Parmentier

 

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Et ses rêves s'inscrivent dans le vent

9 Novembre 2023 , Rédigé par Parmentier Monique Publié dans #Versailles

@ BNF - Photo Monique Parmentier / Orphée

Il était une fois... Il y a de cela quelques années, j'ai "découvert" un ouvrage, d'une grande beauté, c'est de cet ouvrage dont je vais vous parler ici.

Dans ma bibliothèque idéale, il y a bien d'autres livres illustrés, ou pas, appartenant au monde de l'édition anglaise, sur lesquels, je reviendrais, mais il y en a aussi bien d'autres. A la fin du mois, je vais recevoir, L'extraordinaire histoire de la Villa Alice de Maëlle Vincensini, une histoire merveilleuse, dont je suis sur Instagram, la si belle et douce aventure. Je relis Jane Austen, comme on savoure une tasse de thé au jasmin ou Earl grey... Bien des oeuvres littéraires de France et d'ailleurs, qui m'accompagnent depuis toujours... Mais il y a celui dont la rencontre m'a marqué par son éclat, à tous jamais. Le livret des costumes et décors du Ballet du Roy aux festes de Bacchus.

@ BNF - Photo Monique Parmentier - l'Automne

Au coeur de Paris, dans l'une des plus anciennes bibliothèque publiques qui soit, se trouve un département, celui de la Réserve des estampes, installé dans ce qu'il reste des appartements du Cardinal Mazarin. Son existence est connue et son accès plutôt réservée à des chercheurs et des passionnés pouvant être introduits. J'étudiais déjà depuis un certain temps les ballets baroques français au Département des Arts du spectacle, lorsqu'un jour où mon esprit vagabondait, est venu à moi, une référence de bas de page, m'y conduisant.

@ BNF - Photo Monique Parmentier - La fée

Aller à la réserve des Estampes, s'est un peu comme emprunter, une route qui mène au pied de l'arc en ciel. Ayant à coté de mes activités de journaliste bénévole en musique classique (ancienne), un travail alimentaire, auquel je me rendais sans plaisir intellectuel, je l'avoue, chaque visite à la BNF pour parfaire ma culture et écrire des articles qui aient du sens, à toujours représenté une évasion, un voyage vers un autre monde, me permettant d'aborder plus sereinement mon quotidien. La réserve des Estampes, elle est devenue une sorte d'Eden, de jardin extraordinaire. 

@ BNF - Photo Monique Parmentier - Les 3 Graces

Cette réserve nécessite d'aller plus profondément dans les bâtiments Richelieu, monter un très bel escalier, laisser quasiment toutes ses affaires dans des casiers (un crayon, quelques feuilles de papier, sa carte d'identité, son appareil photo, voilà tout ce que l'on a le droit d'emmener en salle), franchir deux portes blindées, arriver dans un sas, impressionnée par ce dispositif et apercevoir venant vers vous, la conservatrice en chef du département, tout sourire.  Je venais d'apercevoir des noms sur des boîtes me laissant ébahie comme Ali baba, devant les trésors de la caverne des 40 voleurs. "Oh, c'est magnifique n'est-ce pas, tous ces noms sur ces boîtes ?"... Que dire, si ce n'est "Oh oui !" : Rembrandt, Poussin, Dürer et bien d'autres.

@ BNF - Photo Monique Parmentier - Le sommeil

Ayant été introduite par mail, par une amie conservatrice dans un autre département, elle connaissait les motifs de ma visite. Elle m'installa alors sur une grande table, avec un lutrin et un lourd tissu rouge.

J'ignore combien de temps dura mon attente, peu car chaque séance ne pouvait durer que deux heures, les mardi et jeudi matin. Temps que j'utilisai pour laisser mon regard vagabonder et observer les lieux magnifiques et tous ces noms magiques sur des boîtes.

@ BNF - Photo Monique Parmentier - La reliure

Deux très longs livrets me furent d'abord emmener, que j'ai déjà évoqué ici, concernant des maquettes des costumes de ballet de Louis XIII, puis celui dont la référence m'avait attiré à la Réserve. Un ouvrage magnifiquement relié, sentant merveilleusement bon. Je mis certainement quelques minutes, après l'avoir déposé, bien à plat, à l'ouvrir, tant la reliure était déjà en soi une merveille. Ce que l'ouverture de l'ouvrage allait me révéler, reste pour moi, un inoubliable souvenir.

@ BNF - Photo Monique Parmentier - Graffitis

Le ballet des festes de Bacchus, fut donné en 1651, les 2 et 4 mai, en pleine Fronde, à Paris, au Palais Royal, anciennement Cardinal, donc rue de Richelieu. Ce magnifique livret qui aurait du rentrer dans les collections royales comme un cadeau de son commanditaire, organisateur des plaisirs du Roy, Louis Hesselin (Treslon-Cauchon) (1602 - 1662), dont les armoiries figurent sur la reliure, ne rentra dans les collections nationales qu'en 1805 à l'occasion d'une vente. Son histoire connue permet de retracer son chemin.

@ BNF - Photo Monique Parmentier - Détail costume filigrané d'argent

Toutefois bien des "mystères" entourent, ce livret où ne figurent que les dessins des costumes et décors. Pourquoi est-il inachevé ? Est-ce pour cette raison qu'il resta dans le patrimoine familial, hérité par un neveu, dont les héritiers finirent par le vendre ? Qui est (ou sont les auteurs des magnifiques illustrations (maquettes)) ? Qui a réalisé les graffitis que l'on trouve à la fin du volume et qui semblent aussi anciens que l'ouvrage ? Les costumes authentiques furent -ils aussi magnifiques que leur reproduction où l'auteur, les a -t-il en fait sublimés par l'imagination ? Si certains ne présentaient pas de difficultés particulières à réaliser en un temps très courts, d'autres ont dû demander aux artisans (tailleurs, brodeurs, orfèvres), un travail extrêmement ardu.

@BNF-Photo M Parmentier-Détail costumes Grâces filigrané or et argent

Pour compléter la connaissance de ce livret, on dispose dans les collections de la BNF de la musique et du texte où est indiqué la distribution des rôles. Les vers en sont attribués à Isaac de Benserade (1613 - 1691), mais cette attribution est aujourd'hui encore contestée, alors qu'elle remonte au récit qu'en fit Loret dans La gazette, à l'époque de sa création.

@BNF-Photo M Parmentier - Il cherche la cadence, détail

Le synopsys de ce ballet, en fait une mascarade, dans l'esprit des ballets de Louis XIII, est d'une grande simplicité, mais totalement baroque dans l'esprit. Les rôles en ont été attribués, tout à la fois, à de grands seigneurs, à des valets du Roi et à des comédiens professionnels. Le Roi lui même en fut l'un des acteurs. Mais contrairement à ce que j'ai parfois lu, il n'y interpréta pas Apollon (le Soleil), rôle attribué à un acteur professionnel, le Sieur Cabou. Le jeune souverain ne deviendra la Roi Soleil, que deux ans, plus tard en 1653, à l'occasion du... Ballet de la nuit. Inaugurant son règne absolu, dont disparaîtra la fantaisie baroque.

@BNF-Photo M Parmentier-Détail Trophée de musique

L'attribution des dessins, qui elle aussi est parfois contestée, revient à Henry de Gissey (1621 - 1673). Que ce soit pour les vers et pour les dessins, il s'agit en fait d'un report d'attributions. Puisque concernant le Ballet de la Nuit, elles sont certaines et qu'elles présentent ici des caractères semblables. Mais à moins de découvrir un jour un courrier émanant de Louis Hesselin, rien ne pourra les confirmer ou les infirmer. Bien d'autres noms ont été avancés, et un auteur inconnu, n'est pas improbable.

@BNF-Photo M Parmentier-Fleuve Oubly

Réaliser sans doute, en collaboration avec Giacomo Torelli (1608-1678) pour les décors, les dessins sur un format 33,4x 22,1 cm, aquarellés rehaussés d'or et ou d'argent, gouaches et encre et sont pour la plupart inachevés, mais tous d'une grande beauté, parfois infiniment poétiques (tels l'automne, le sommeil, Orphée, le fleuve Oubly, les fées...). Bien que représentés une seule fois, certains personnages dans le ballet, étaient multiples, tels les muses, les bacchantes, les fées...).

@BNF-Photo M Parmentier-Détail Apollon

Je ne m'autorise à partager ici que quelques photos, dont des détails, la BNF a désormais mis en ligne cet ouvrage sur Gallica), mais je peux vous l'assurer, ces dessins, sont porteurs d'une émotion indicible, tant leur grâce ineffable, est celle des contes que l'on imagine lire à la veillée. Cette élégance quasi surnaturelle, qui même sur des personnages aussi inattendus et farfelus que "Je cherche la cadence", les gladiateurs, les trophées de la musique, sont si évocatrices des mystères dionysiaques, thématique pour le moins triviale d'ailleurs dans le texte, du ballet. Uniquement interprétés par des hommes, certains participants portaient des masques, parfois à peine discernables sur les dessins, leurs costumes donnant le sentiment d'être fait en des tissus luxuriants et fastueux. Fronde ou pas, la cour offrait à son jeune roi des distractions créant un sentiment d'irréalité du monde extérieur. Sentiment que j'ai souvent rencontré à Versailles, mais aussi dans le monde de la culture. Entrer à la Réserve des estampes, passer des heures en compagnie de tels chefs-d'oeuvre, dans un environnement aussi paisible, proche du recueillement, m'a toujours rendu le retour à mon quotidien, extrêmement difficile.

@BNF-Photo M Parmentier-Trophée Musique

Si les costumes et les décors sont oniriques, le texte accompagnant chaque scène et entrée, révèlent donc une certaine canaillerie extravagante, à la poésie loufoque et non dénuée d'un certain charme.

@BNF-P Monique Parmentier-Photo prise de dos du Sommeil

"Sçachez qu'on doit aymer alors qu'on eft aymé
Et quand par vos faueurs (faveurs) mes voeux Seroient contens
Vous ne Sçauriez eftre blafmées
De vous accommodez au Temps..."

"Attraper la cadence eft un pénible ouvrage
Je perds en cette enquête & ma peine & mes pas..."

J'aime l'orthographe, malheureusement je ne dispose pas ici des bonnes polices, aux caractères évocateurs de cette époque où la langue française se cherchait encore, et où la prononciation reconstituée par Benjamin Lazar, dans certains spectacles du Poème harmonique, laisse d'ailleurs éclore le verbe en toute liberté.

@BNF-Photo M Parmentier

Après une introduction prêchant l'abstinence comme une grande vertu, l'ensemble des personnages en défilant, vas donc à contrepied défendre, le jeu, l'amour, le vin, la goinfrerie... Les vices comme un art de vivre. Les rêves n'y sont que des mensonges, à moins que ce ne soit celui qui l'affirme qui mente aux spectateurs. Jeu baroque ou la mort n'est pas plus qu'un songe. Les personnages les plus évocateurs de poésie ou de noblesse sont ridiculisés par Bacchus et ceux qui le servent. Le Sommeil lui - même avoue ne devoir son succès auprès des belles dames, qu'à la faveur du pavot, dont il abuse. Le jeune roi, interprète des personnages sans noblesse (une Grace, une bacchante, un homme de glace ou plutôt un "glacé", un filou, un titan, une muse, et ce n'est pas Louis XIV qui conclut dans le rôle conclusif ce ballet, mais un certain comte de Mauleurier, d'après le livret, en fait Edouard - François Colbert, comte de Maulevrier (1634-1693), père du fameux ministre du Roi Soleil.

@BNF - Photo M Parmentier

La musique, parce qu'il y en avait une, fut éditée par Philidor Laisnée, longtemps après, en 1690. Elle fut composée par François de Chancy (chanteur, luthiste et compositeur actif dans la première moitié du XVIIe siècle, mort en 1656), le plus connu de tous ; Louis de Mollier (vers 1615 - 1688) ; Michel Mazuel (1603 - 1676) et un certain Verpré dont le nom n'apparait que dans l'édition de Philidor Laisnée, à l'occasion de ce ballet.

@BNF-Photo M. Parmentier

Des décors furent donc installés pour accompagner certaines des scènes, attribués à Torelli. Malgré l'oxydation des blancs de plomb, ils en conservent toute leur force. Les moyens théâtraux mis en oeuvre semblent tout aussi surprenant par leur grandeur que les costumes.

@BNF-Photo M Parmentier

Avoir passé, en compagnie de ce livret, du temps en tête à tête, dans le silence de la salle de lecture, ne m'a laissé que des souvenirs magiques. Si j'ai mis du temps, ne disposant pas d'autant de moyens que des historiens professionnels pour restituer son histoire, il reste des questions auxquelles probablement nul ne saura répondre. Les mystères qui voilent encore la mémoire liée à l'évènement, à la création de ce spectacle, puis du livret et aux chemins empruntés par ce dernier pour nous parvenir, en ces lieux et ces collections, ajoutent une touche de fantasmagorie à ce livre unique. Un livre de rêves, fait pour rêver, oublier, s'oublier, partir, voyager, au -delà des horizons du quotidien. En conservant sa part de mystère, il porte en lui, ce qui contribue à souligner, l'objet baroque dans toute son étrangeté. Il nous invite à inventer, une autre histoire, celle que nous souhaitons en le feuilletant, qu'il nous raconte.

Par Monique Parmentier

@BNF-Photo Monique Parmentier-Bacchus

 

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All children, except one, grow up...

23 Octobre 2023 , Rédigé par Parmentier Monique Publié dans #Poésie et Littérature

@ The all sort of stories book by Mrs. Lang & Andrew Lang

Non non, mon voyage imaginaire, dans ma bibliothèque idéale ne s'est pas arrêté. Il se poursuit bien au contraire. Mais il faut bien avouer que le « combat » pour trouver mon chez moi à Narbonne, n'est pas simple. Cherchez à distance, en pleine crise du marché immobilier devient un calvaire. Cela prend d'autant plus de temps qu'il faut sans cesse relancer des agences immobilières qui sont forcément très sollicitées. Et à mon âge devoir parfois entendre des arguments d'une rare impolitesse me pèse, comme me pèse de voir certains agents immobiliers se comporter si mal, alors, que les choses passeraient mieux, si la relation restait respectueuse et honnête. Mais cela est à l'image de ce qui se passe partout. Les réseaux dit sociaux, diffusent plus de haine que de beauté et d'empathie, alors forcément, les comportements asociaux sont à la mode et touchent même des gens qui n'ont pas forcément un mauvais fond. L'épidémie de méchanceté qui s'est répandue depuis le début de l'épidémie de Covid 19, rend tout plus difficile.

@ Christina Rossetti - Florence Harrison - Goblin Market

Mais bon, je continue d’y croire et en attendant je poursuis mon voyage. Croire que le beau et la gentillesse, finiront par rendre le sourire, à ce monde devenu si violent et si triste, est pour moi vital.

J'avais ouvert un bel ouvrage, il y a peu pour ses magnifiques illustrations de Florence Harrisson, les poèmes de Christina Rossetti. Ce que j'aime dans les "One Upon a time", c'est le côté léger, comme des bulles de savon, de certains textes. Ainsi Goblin Market qui ouvre ce magnifique recueil des poèmes de Christina Rossetti ... les goblins de méchantes petites créatures qu'Arthur Rackham a peut être dépeint avec plus de vivacité et de subtiles cruautés, que Florence Harrison: 

@ Arthur Rackham - Christina Rossetti - Goblin Market

Morning and evening
Maids heard the goblins cry:
“Come buy our orchard fruits,
Come buy, come buy:
Apples and quinces,
Lemons and oranges,
Plump unpeck’d cherries,
Melons and raspberries,
Bloom-down-cheek’d peaches,
Swart-headed mulberries,
Wild free-born cranberries,
Crab-apples, dewberries,
Pine-apples, blackberries,
Apricots, strawberries;—
All ripe together
In summer weather,—
Morns that pass by,
Fair eves that fly;
Come buy, come buy:
Our grapes fresh from the vine,
Pomegranates full and fine,
Dates and sharp bullaces,
Rare pears and greengages,
Damsons and bilberries,
Taste them and try:
Currants and gooseberries,
Bright-fire-like barberries,
Figs to fill your mouth,
Citrons from the South,
Sweet to tongue and sound to eye;
Come buy, come buy.”

@ Arthur Rackham - Christina Rossetti - Goblin Market

« Matin et soir, les jeunes filles entendaient le cri des goblins
Venez acheter, venez acheter :
Pommes et coings
Citrons et oranges
Cerises dodues non becquetées,
Melons et framboises
Pêches aux joues duveteuses,
Mures aux têtes cuivrées,
Airelles nées en liberté,
Pommes sauvages, mures des bois
Ananas, mûres des ronces
Abricot, fraises
Tous bien mûrs
Dans une atmosphère d'été
Matins qui passent
Belles soirées qui s'envolent
Venez acheter, Venez acheter ;
Nos raisins tout frais cueillis de la vigne
Grenades pleines et goûteuses,
Dattes et prunes de berger,
Reines-claudes et poires remarquables,
Questches et myrtilles,
Goûtez - les, tatez ;
Raisins de Corinthe et groseilles à maquereaux,
Epines-vinettes écarlates,
Figue à vous en gaver sans faim,
Citrons du sud,
Doux pour la langue, plaisants à l'oeil,
Venez acheter, venez acheter »

 

@ The green fairy book

Mais voilà, que d'autres livres, d'autres merveilles se découvrent à mon regard qui ne cesse d'aller d'étagères en piles de livres... Des noms parfois connus, parfois oubliés, des titres qui semblent reprendre la trame de vie de Peter Pan et d'Alice et s'avèrent dévoiler un nouvel univers à chaque fois.
 

@ The Brown Fairy Book

 Est-il encore aujourd’hui, beaucoup d’enfants qui rêvent de partir vers un pays imaginaire, où tout en combattant pirates et crocodiles, on peut jouer, rire, faire des rencontres aussi surprenantes que le chat du Cheschire ? Et ce, sans les idées parfois tordues d’adultes, qui coupent les cheveux en quatre, pourvu que les moulins à vent, continus de mouliner. J’ai eu la chance d’appartenir à une génération qui dans son enfance, n’avait pas même un téléviseur et où les livres étaient des compagnons de jeux. Je lisais des récits de voyages, datant du XIXe siècle en imaginant ces mondes du bout du monde. Et comme les illustrations et les premières photos (comme celles des photographes qui parcouraient le monde pour Albert Kahn), laissaient plus à deviner qu’à montrer, ces mondes valaient bien tous les « Secret Garden », tous les Neverland et jardins imaginaires, tout en me permettant d’imaginer combien ces mondes oniriques des poètes et conteurs, étaient de fait, encore plus beaux que ceux des aventuriers qui parcouraient la planète. Les aventuriers des temps jadis étaient pour moi des lapins blancs que je suivais au gré de mes découvertes.
 

@ The Brown Fairy Book - Henry Justice Ford

Once upon a time… Tout désigne un homme (en fait son rôle fut bien plus modeste que celui de sa femme) mais qui sans sa femme n’aurait probablement pas accompli le prodigieux travail à l’origine de la première édition contemporaine des contes de fées et légendes d’Europe à destination des enfants. Et bien que clairement destiné à ce nouveau public, les adultes eux-mêmes collectionnèrent dès les premières éditions ces ouvrages.
 

The Brown Fairy Book - Henry Justice Ford

 A l’époque victorienne, les convenances tenaient une grande place dans la vie des femmes qui tentaient, malgré tout, d’exister pour leurs talents. Si donc l’histoire a retenu le nom de cet homme, Andrew Lang (1844 – 1912), homme de lettres, journalistes, poètes, critiques littéraires, c’est sa femme Leonora Blanche Alleyn (1851 – 1933) qui a rassemblé, compilé et traduit les contes et poèmes d’Europe, d'Asie et d'Afrique, formant la série de « livres féériques des couleurs », the colour fairy book, édités par son mari. Elle était toutefois aidée par deux autres femmes May Kendall (1861 – 1943) et Violet Hunt (1862 – 1942).
 

@ The Brown Fairy Book - Henry Justice Ford

Si ces traductions édulcorées, ne transmettaient pas les contes tels que retranscrits depuis des siècles dans le folklore local, mais tels que ces dames étaient plus autorisées à les raconter, que les enfants à les entendre, il n’en empêche pas moins que le travail de traduction est d’une rare beauté. Et ce d’autant plus que rien n’interdisait par des formules poétiques de laisser sourdre les menaces du monde adulte, celui plus cauchemardesque et plus violent qui a toujours été présent dans les contes. Si le caractère éducatif est bien présent, il n’est jamais lourd et certaines formules sont autant de clin d’œil au droit de dépasser le cadre. Le tout se mesure donc à la qualité de la traduction et à la connaissance que depuis des critiques ont pu avoir par leurs études des traditions retranscrites dans ces ouvrages, qui se présentent tels de véritables joyaux aux lecteurs. Nos trois dames n'étaient pas que des traductrices, mais aussi poètes et essayistes, un tantinet suffragettes, comme la plupart des femmes illustratrices et poètes rattachées ou non au mouvement pré-raphaëlite. Elles furent aidées par des illustrateurs, qui ont parfois suggéré la sensualité ou les émotions des personnages, elles nous ont ainsi légué un héritage précieux.

The violet Fairy book

 Les reliures des « colours Fairies books » d’Andrew Lang sont un véritable écrin pour des contes et légendes qui nous prennent par la main en nous murmurant « Il était une fois »… Ou « il y a bien longtemps » ou « Tous les enfants grandissent, sauf un. Ils le savent très tôt » (All children, except one, grow up. They soon know…) … Et ce que tous ces livres merveilleux, et pas seulement les contes illustrés, mais tous sans exception m’offrent, c’est de rester une « enfant », éveillée et curieuse, qui jusqu’à la fin du voyage, aura envie encore et toujours d’ouvrir des livres, franchir le pas des portes de l’indicible beauté.
 

@ DR

Pour en revenir aux livres édités par Andrew Lang, ils sont au nombre de 12, publiés entre 1889 et 1910 : les livres aux couleurs (de leur reliure) des fées resplendissent sur les étagères : The Blue Fairy Book (1889), The Red Fairy Book (1890), The Green Fairy Book (1892), The Yellow Fairy Book (1894), The Pink Fairy Book (1897), The Grey Faiy Book (1900), The Violet Fairy Book (1901), The Crimson Fairy Book (1903), The Brown Fairy Book (1904), The Orange Fairy Book (1906), The Olive Fairy Book (1907) et The Lilac Fairy Book (1910).

@ The Brown Fairy Book - Henry Justice Ford

On retrouve dans ces ouvrages, les contes entre autres, d'auteurs français comme Charles  Perrault ou Mme d'Aulnoy.

Tous furent illustrés par un artiste britannique, surtout connu pour ce travail, Henry Justice Ford (1860 – 1941).
 

The Pink Fairy Book

  Issu des écoles d’art classique britannique, Henry Justice Ford possède un style qui oscille entre Art nouveau et pré-raphaëlisme. Il a recours à la plume et à l’encre pour ses dessins, -ce qui n'est pas sans rappeler Walter Crane, l'illustrateur de William Morris-, qu’il colorie parfois soigneusement à l’aide d’une palette extrêmement vive. Outre l’illustration pour la littérature dite « pour enfant », il conçu également des costumes de théâtre, dont ceux des premières représentations de Peter Pan.

Andrew Lang lui, poursuivi tout au long de sa vie ce travail d’édition. Ainsi dans ma bibliothèque idéale, forcément, croiserais-je, d’autres de ses ouvrages.

@ The Pink Fairy Book - Henry Justice Ford

 Ce qui frappe en les lisant et en les regardant, c'est un étrange sentiment de déjà vu, qui nous permet de mieux retracer l'influence sur de jeunes enfants qui devinrent par la suite de grands auteurs, certains n'hésitèrent d'ailleurs pas à le reconnaître comme Tolkien, dont on ressent les souvenirs dans lesquels il a sans doute inconsciemment picorés, ou CS Lewis pour lequel, l'influence est clairement plus évidente, ou sur des auteurs adultes qui n'hésitèrent pas à clamer leur admiration pour ces ouvrages comme Conan Doyle.

@ Yellow Fairy Book - Henry Justice Ford

  Si le monde anglo-saxon de l'édition et de l'illustration a connu son âge d'or dans la seconde moitié du XIXe siècle et la première moitié du XXe siècle, il a envers et contre tout survécu. Bien mieux qu'en France, où l'illustration reste un art très secondaire, essentiellement destiné aux livres pour enfants. Il me reste encore bien des routes, chemins, venelles et passages secrets à en explorer. 

@ The Orange Fairy Book - Henry Justice Ford

  Tandis que j’écris, il pleut et la nuit semble devoir venir avant même quatre heure de l’après-midi. Les volutes d'un chocolat chaud, apportent des arômes douces et rassurantes, à la pièce qui s'assombrit Ainsi jour et nuit se confondant, la lumière qui oscille.. Le rêve se poursuit… Once upon a time… « All children, except one, grow up. They soon know… ». M'arrêterais - je la prochaine fois, sur un livre de botanique, à des échantillons de tissus, des papiers peints, à des manuscrits anciens, des correspondances ou des poèmes... Qui sait. Ma promenade, se poursuit.

Par Monique Parmentier

 

 

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Florence Harrison : Beyond the fair green field and eastern sea

10 Octobre 2023 , Rédigé par Parmentier Monique Publié dans #Poésie et Littérature

@ DR Elfin Song - Florence Harrison

Je suis revenue vers Florence Harrison, Florence Harrison - Pre-Raphaelite Sisterhood - YouTube , fascinée par son oeuvre, comme un papillon de nuit l'est par la lumière. Le mystère laissée par l'ombre d'une vie qui ne donne aux historiens de l'art et collectionneurs passionnés (dont une certaine Mary Jacobs qui lui a consacré un site internet) que peu d'éléments qui participent peut être à l'attirance qu'on pourrait lui porter, mais ses illustrations sont à mes yeux parmi les plus belles que je connaisse, et les poèmes qu'elle a elle-même écrit, nous laisse d'elle, le sentiment d'une personnalité enchanteresse, érudite et envoutante. Une personnalité qui s'est construite seule, pour le peu que l'on en sait, ou presque, observant, écoutant, libre.

@ DR Florence Harrison

Née sur un bateau à quai à Brisbane, dont son père était le capitaine, le 2 novembre 1877, elle vécut l'essentiel de son enfance au Royaume Uni. On ne sait quasiment rien de l'éducation qu'elle reçut, l'illustrateur John Howe en parle sur la page qu'il lui a consacré, accompagné d'une analyse artistique, avec l'oeil d'un maître. Je vous invite à découvrir leurs pages, en suivant les liens, pour en savoir autant que possible sur la femme et l'artiste.

Mais au-delà, de toutes les qualités artistiques qu'on ne peut que lui reconnaître, il y a aussi l'émotionnel intense qui surgit de l'oeuvre de Florence Harrison. Difficile de surmonter cette sensation, de ne pas ressentir l'intensité à fleur de larmes, des sujets et de leur traitement. Un univers poétique, y nait à chaque nouveau regard qui le découvre, sensible, au-delà du réel, mouvant, évanescent, intemporel, surnaturel.

@ DR Florence Harisson

Le monde (les mondes) de Florence Harrison est celui du beau, d'une spiritualité sans dieu omnipotent. Et même si sa conversion au catholicisme à la fin de sa vie, influence ses dernières illustrations dans leur thématique, jamais l'on ne sent écrasé par la représentation qu'elle en donne.

Alors, Once upon a time... Chère Florence, un jour, j'ai peut être été cette enfant que vous avez été. Grace à vous, je me rêve sur le pont d'un clipper, grand voilier qui sillonnait les mers à la fin du XIXe siècle, scrutant l'horizon, tentant d'apercevoir ces mondes enchantés, où le meilleur est possible.

@ DR Florence Harrison - Elfin song

Lullaby from the wind, of the shore
To the wind of the sea, lullaby.
Lullaby from the sea to the boat
She rocks the night long on her breast.
Lullaby from the bird of the wave,
The bird of the wood, lullaby,
For the sleep on the steep of the cliff,
And the sleep in the down of the nest.
(extrait de Lullaby poème de Florence Harrison)

 

@ DR Florence Harrison Elfin songs

Sometimes we drift where showers lift
A fairy-splendoured bow,
Or lie encharmed, long time becalmed
In the un-windy glow.
On the hidden mountain peaks
Maybe we strike and shiver,
And tattered sails float on the gales
Across a flooded river.
(extrait de Ships on the sky de Florence Harrison)

Fait-il nuit ou jour ? Emporté par un sommeil quasi fantasmagorique, tandis que la mer rugit qu'un arc en ciel ou un rayon d'étoiles fend un ciel d'encre, l'enfant se laisse emporter dans les mondes enchantés, toutes voiles dehors. Est - il besoin de psychiatre pour voir dans l'univers de Florence Harrison, au-delà des mots ? Je ne le pense pas. Non la poésie et l'oeuvre dessinée de Florence Harrison, permet de dépasser ses peurs, de se sentir moins seule, tandis que le vent siffle et que l'on est secoué, balloté de vagues en vagues. Pour aller de l'Australie à l'Angleterre les routes maritimes, passaient forcément par le Cap Horn. A l'extrême sud du monde, la "tête renversée", on est à la "croisée des mondes"... Pour peu le "chemin de traverse" peut vous conduire vers un ailleurs où l'aventure devient merveilleuse.

@ DR Florence Harrison Elfin Song

Le chant des elfes dans la nuit, vient couvrir le rugissement des vagues et du vent, le rayon chatoyant et chamarré d'une étoile, transperce les sombres nuages des tempêtes australes.

Une maman attentive, à la lueur de la bougie ouvre le livre magique, fées et nymphes, peuvent vous entrainer dans leur danse radieuse et joueuse, qui vous permettra de traverser la nuit et les océans, sans que le moindre spectre, ne puisse s'en prendre au grand voilier qui fend les vagues.

@ DR Florence Harrison Elfin song

Pourquoi devrait-on renoncer à s'échapper du réel, celui qui pousse les psys à considérer les rêves, comme une autre expression, un fantasme, refoulé du réel ? Chez Florence Harrison, ce que j'aime c'est ressentir, les émotions, les souvenirs terrifiants et doux, ensorcelés et enchantés. Nul besoin de comprendre l'anglais pour percevoir, le sens et avoir le sentiment que ces vers, accompagnent des circonstances effrayantes que nous avons le sentiment d'avoir vécu enfant, ou l'une de ces histoires de vampire, d'ogres ... que nous aimions nous voir racontées avant de nous endormir. Un jeu d'enfant qui petit à petit se construit son univers, son monde où le rêve a le droit d'être, même lorsque devenu adulte, banquier ou employé, mineur ou marin, le besoin d'espérer passe par l'irréel, le surnaturel, la pensée que certains disent magiques.

@ DR Florence Harrison - Elfin song

On a tous (enfin beaucoup d'entre nous) besoin d'un jardin secret, où la beauté - des fleurs, des oiseaux, des arbres, des paysages - côtoierai la beauté de ces êtres invisibles dont l'enfance s'est nourrie comme l'humanité à ses origines. Les mondes des fées et des elfes, les mythes sur lesquels nos civilisations se sont construites, sont autant de refuges que de portes ouvertes vers l'inconnu. Les préraphaélites, qui ont inspiré Florence Harrison, estimaient qu'il appartenait aux artistes, de donner l'accès au beau au plus grand nombre et pour cela de leur offrir les clés de l'imaginaire et de l'imagination, sources de créativité. L'artiste, l'écrivain était un passeur de rêves.

@ DR Florence Harrison - Elfin song

Je ne peux que vous inviter dans ma bibliothèque idéale et vous saisir des livres illustrés par Florence Harrison, Elfin Song, les poèmes de Christina Rossetti, Guinevere and others poems of Tennyson et bien d'autres, et si au fond, même si l'anglais reste pour vous, une langue ésotérique, ne vous en inquiétez pas, les illustrations et la sonorité des mots, vous diront l'essentiel. Oui la beauté peut vous accompagner, il vous suffit de fermer les yeux, l'espace d'un instant et de prononcer les mots magiques : Once upon a time... Il était une fois, puis d'ouvrir la page où la route des rêves, ressemble à un chemin étoilé.

Par Monique Parmentier

 

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Ninna Nanna : Remember me

7 Octobre 2023 , Rédigé par Parmentier Monique Publié dans #Poésie et Littérature

@ Florence Harrison

ANGELI al capo, al piede;
E qual ricciuto agnello
Dormir fra lor si vede
II bel mio bambinello.

[Love me, I love you] Amami, t' amo,
Figliolin mio:
Cantisi, suonisi.
Con tintinnio.

Mamma t' abbraccia,
Cor suo ti chiama;
Suonisi, cantisi,
Ama chi t'
Christina Rossetti

@ Christina Rossetti - Florence Harrison

Me laissant porter par la visite de ma bibliothèque idéale, j'ai croisé parmi les illustrateurs, un certain nombre de dames, connus des collectionneurs mais dont le nom a été oublié du grand public. Au point d'ailleurs que bien qu'ayant occupé une place non négligeable à leur époque (seconde moitié du XIXe siècle et première moitié du XXe siècle), il n'existe bien souvent sur le net que des informations fragmentaires, sur des artistes pourtant extrêmement talentueuses.

Florence Harrison - Night slight down - Tennyson

Et plus le temps passe et plus je me familiarise avec le mouvement Art & Craft (moi la baroqueuse), retrouvant au passage la fascination que j'avais enfant pour les beaux livres illustrés et les images prédécoupés destinés à orner des Scrap books victoriens dont certaines me rappellent ma grand-mère qui m'en avait offert, il y a bien longtemps quelques unes. Comme il est fascinant de penser que les berceuses illustrées et ces images extrêmement colorées pour collage d'un autre temps, se sont retrouvés sur mes chemins de curiosités. Concernant ces images, je suis sur Instagram, le compte d'une conservatrice de la Winterthure library dans le Delaware, près de Philadelphie. 

Florence Harrison - Dreamland

Et par des chemins détournés, les berceuses ne voulant pas me quitter, je suis tomber sur les premiers poèmes de Christina Rossetti, pour partie dans la langue du pays de son père, l'italien.

Je ne me lasse pas de découvrir toutes ces merveilles et plus encore de la place étonnante que les femmes y ont tenue. Tout est partie de mon envie d'écrire un article sur mes illustrateurs "préférés", Arthur Rackham, Edmund Dulac et Kay Nielsen et je découvre des illustratrices dont la vie et l'art me semble encore plus fascinants. Je sais déjà que je reviendrais vers Florence Harrison, dont le peu que je sais d'elle est que son enfance, fut forcément influencée par ses voyages entre sa terre natale, l'Australie et sa terre d'origine où elle vécut, le Royaume-Uni. Prendre la mer, durant l'enfance, voir l'horizon comme une ligne infinie, où toutes les histoires sont possibles, cela doit forcément laisser des traces.

@ DR Beatrix Potter

Hier au soir, j'avais envie de me reposer, sans faire trop d'efforts, je l'avoue et cherchais un film susceptible de me faire passer une douce soirée. Difficile de trouver, ce genre de programme. Le cinéma et les chaînes de diffusion de films préférant diffuser des films dans l'air du temps, violents, moches et trop souvent vulgaires. Et puis, aller savoir pourquoi, les illustratrices et conteuses ne voulant pas me quitter, je suis tombée sur une petite pépite : Miss Potter. Quel bonheur ce film (cela dit avec la même actrice, Renée Zellweger, j'ai beaucoup aimé la série des Bridget Jones, il faut dire que le scénario des trois volets et les acteurs, y sont formidables). Bref, bien sûr Béatrix Potter, Peter Rabit, Benjamin Bunny, Squirrel Nutkin et tous ces merveilleux personnages, m'ont donné envie de me plonger dans ces paysages et ces mondes enchantés. Et si dans ces univers, tout n'est pas forcément doux, pas plus que dans aucun conte d'ailleurs, il y a ce charme indéfinissable, qui quelque part nous ouvre les portes d'un monde plus généreux.

@ DR - Béatrix Potter

D'ailleurs, Béatrix Potter qui concevait par ailleurs les histoires que nous content les images, est probablement une des rares illustratrices à avoir pu gagner sa vie et disposer d'une notoriété, lui permettant ainsi d'être active dans la préservation des lieux qui l'ont inspiré.

Quel bonheur de voir ses dessins s'animer, tandis que son pinceau oeuvre. Un clin d'oeil, un mouvement léger pour se débarrasser d'une écharpe gênante... Quelques animations qui font de ses personnages, des êtres vivants, des amis à part entière. Ce film est une petit merveille. Ressenti du lecteur et anthropomorphisme assumé par l'artiste, elle qui était aussi passionnée par toutes les sciences de la nature, mais qui par son art, dans la continuité d'un XIXe siècle victorien qui aimait à voir des fées dans les mouvements d'ailes des papillons, nous a donné à rêver enfants et adultes en quête d'un retour à l'innocence.

@ DR Florence Harrison - Sleep at sea - Christina Rosseti

Voilà, je reviendrais sur mes promenades et surtout sur les illustratrices. Je n'en ai pas fini. A 64 ans, dans ce monde si violent, le rêve, l'empathie, la beauté sont essentielles. Me suivrez - vous dans mes passeggiata... Livresques. Ma bibliothèque idéale est si riche. Chaque livre, est une invitation onirique aux voyages.

@ DR - Florence Harrison - Raiponce

Where sunless rivers weep
Their waves into the deep
She sleeps a charmed sleep :
Awake her not.
Led by a single star,
She came from very far
To seek where shadows are
Her pleasant lot.

Où pleurent les rivières sans soleil
Leurs vagues dans les profondeurs
Elle dort d'un sommeil enchanté :
Ne l'a réveille pas
Menée par une seule étoile
Elle venait de très loin
Pour chercher où sont les ombres
Son sort agréable.

Christina Rossetti

Par Monique Parmentier

 

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Lullabies : rêve poétique

1 Octobre 2023 , Rédigé par Parmentier Monique Publié dans #Poésie et Littérature

Depuis quelque temps, je me promène dans ma bibliothèque idéale. Celle qui a tout à la fois le goût de l'enfance perdue et d'une vie où le beau a heureusement réussi à se préserver, un refuge. J'aime la poésie, la musique. J'aime les beaux livres et les mots qui chantent. Il est des poèmes, des illustrations qui toujours me ramènent à un rêve musical. En suivant ainsi les mots, j'ai retrouvé celle qui m'a toujours apaisé. Qu'importe la berceuse, le murmure s'insinue en un souffle léger, parfum de jasmin, de roses aeterna... Montserrat Figueras me manque depuis que les étoiles l'ont rappelé si loin de nous.

@ Alia vox

Lorsque j'ai commencé à feuilleter les pages virtuelles de ce livre si précieux, dont les mots et les mélodies ont accompagné tant de mamans, tant de nouveaux nés dans leurs premiers rêves, j'ai perçu sa présence, comme une évidence,  me ramenant à ce jour où discutant avec elle, elle posa ses mains sur mon bras droit, pour me réconforter et m'encourager à poursuivre ma route sur les chemins de la musique et de la poésie.

@ DR

Lullabies... Berceuses... la berceuse rite universel, musique de l'origine, rendant soutenable à l’aube de la vie la première séparation. Elle est ainsi chantée par Montserrat Figueras, une main tendue entre la douleur infinie et l’amour à jamais.

@ DR - Illustration Grèce

Les vers, ci-dessous, sont issus d’une berceuse irlandaise, qu’elle aurait pu chanter. Certains me diront, que cela ne vaut pas un poème de Baudelaire ou de Yeats... mais la comparaison en matière de poésie me semble absurde. Les textes de ces berceuses, portent en eux, une musique du coeur et des émotions, envoûtante, ensorcelante. Une musique qui n'est pas seulement celle des nouveaux nés, mais celle qui toujours nous trouve reclus sur nos douleurs pour mieux nous donner à voir l’indicible lumière, d'un lien plus fort que tout, qui nous relie à tous ceux que nous avons aimé et qui nous aiment par delà le temps et l'espace :

@ DR

"On a bed of fragrant roses asleep the morning lies. And the quiet evening sleepeth where the dusky hilltops rise ;
Then sleep, my child, my darling — do thou, too, close thine eyes.
In a rock-bound hollow lying, the winds sleep 'neath the hill;
With feathery clouds for pillow, the stars sleep calm and still ;

Then sleep, my child, my darling — do thou, too, sleep thy fill."

@ DR

"Sur un lit de roses parfumées, le matin est endormi. Et le soir tranquille dort là où s'élèvent les sommets sombres des collines ; 
Alors dors, mon enfant, ma chérie ; toi aussi, ferme les yeux.
Dans un creux rocheux, les vents dorment « sous la colline » ;
Avec des nuages plumeux pour oreiller, les étoiles dorment calmes et immobiles ; Alors dors, mon enfant, ma chérie, et toi aussi, dors à ta faim."

@ DR

La berceuse, est la musique des rencontres, des apprentissages, des premiers chants partagés des jeux d’enfants, souvenirs ineffables de l'innocence perdue. Mais y sourde, ces menaces sombres et tout juste ébauchées, qui bientôt nous rattrapent sur le chemin de la vie : les référence à la vie et à la mort, aux larmes, à la pluie et aux orages, aux chagrins qui nous frapperont tôt ou tard…Parfois chant marial, la Vierge est une maman qui sait que la vie est un cadeau et un don de soi, un don qui conduit à l’abandon absolu.

@ DR

Que de berceuses, j'ai souvent aimé écouter, particulièrement bien sur celles interprétées par Montse, mais aussi par Arianna sa fille et Petter Udland Johansen. Dans les programmes d'Hirundo Marris, leur ensemble, on retrouve ce répertoire si tendre, qui s'apparie si bien avec la Harpe céleste, instrument dont Arianna est une si merveilleuse interprète, mais également avec leur timbre. Un timbre dont la clarté éloigne la nuit, la peur, la méchanceté qui nous environnent. 

@ DR

Bien sûr la musique classique, mais également le jazz et la variété se sont emparés de ce répertoire. Certains instruments, comme le duduk arménien (le programme/Cd, Esprit d'Arménie de Jordi Savall, est en cela, une magnifique continuité des programmes sur les berceuses. que le maestro a enregistré avec son épouse. Une musique du deuil, quête de l’apaisement), ou les mélodies de Debussy au piano ont cette faculté de m'emmener sur les voies de la paix intérieure, de la sérénité, ou comme Sospiri d'Elgar. En vieillissant, on découvre que la beauté idéale, est probablement, celle qui comme dans ces berceuses, ne recherche que cette sensation à fleur de peau, cette petite chose indéfini et poignante, qui nous inquiète toute notre vie, pour mieux l'apaiser. Sans effets grandiloquents, avec douceur et empathie, la berceuse est la poésie de l'éphémère. Je n'ai jamais été aussi bouleversée qu'en entendant Arianna Savall, interpréter des berceuses au côté de sa mère ou de Petter ou l'adieu ou Gracias a la vida et sa maman toutes ces merveilleuses berceuses de l'album Ninna nanna. Des chants qui nous disent, sans cesse la fragilité et la beauté de tout ce que la vie nous offre mais nous reprendra.

@ Hirundo Marris

Ce sont les voix de Montse, Arianna et Petter, qui ont surgi des pages, de ce magnifique recueil de Lullabies (berceuses) datant de 1894. Les poèmes qui le composent, sont tous issus de traditions populaires européennes. Ils ont été recueillis, rassemblés et traduit par Alma Strettell (1853-1939). Traductrice et poétesse anglaise, qui s'est passionnée pour le folklore et les contes populaires. Sa maîtrise des langues, lui permettait de faire chanter les mots, issus du roumain, de l'italien, du français, du grec, de l'espagnol, de l'allemand ou du vieil anglais dans sa propre langue, l’anglais contemporain, avec un talent de musicienne, qui explique peut être, l'étrange résonance à la lecture de ce livret magique. 

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Les illustrations ici, ont été réalisées par une autre femme, Emily J. Harding (1850-1940). Artiste, illustratrice... et suffragette britannique. D'elle, l'histoire a surtout retenu son combat pour la place et les droits des femmes. Mais c'était une artiste qui s'est construit son propre style. Si certaines illustrations à ses débuts sont autant influencées par le mouvement Art & Craft que par les écoles de peintures plus classiques du 19e siècle britannique, elle trouve comme ici, ce mouvement, cette épure qui suggère les mouvements de l'âme et des émotions, tout en évoquant le contexte de naissance de chaque berceuse illustrée, d’un trait maîtrisé et pourtant évanescent. Et les différences entre les différentes cultures, n'en sont que plus belles. L’art du dessin, célèbre ici aussi bien le folklore dans ce qu'il a de plus beau et l'universalité dont chaque culture est porteuse.

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Le travail d’une si belle sensibilité, réalisé par ces deux femmes à la fin du XIXe siècle et leur éditeur, George Allen mérite d’être souligné. Combien de livres aujourd'hui, sont encore ainsi imprégnés de leur propre musique, de leurs murmures, de leurs larmes et leurs rires ? Combien de livres aujourd'hui, pourraient ainsi, nous apporter un tel sentiment d'harmonie ?

En dehors des oeuvres de Tolkien, qui bénéficient des talents d'illustrateurs saisissant et singulier comme John Howe et Alan Lee, le monde de l'édition a renoncé à s'engager sur de tels chemins. Et pourtant, réseaux sociaux ou pas... Rien n'est plus beau qu'un livre qui chante, lorsque le lecteur s'abandonne, et livre son âme à l’infini beauté des mots et des dessins, d’un art où tout est musique.

Par Monique Parmentier

 

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