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Le blog de Susanna Huygens

Venise, une songe baroque pour aimer à la folie

10 Février 2012 , Rédigé par Parmentier Monique Publié dans #Chroniques Concerts

Marc MauillonIsabelle Druet - Marc Mauillon

Angélique Mauillon, Harpe - François Guerrier, Clavecin - Le Poème Harmonique

Opéra Comique, le 9 février

 

Voici que se terminent les représentations de l'Egisto de Cavalli à Paris et par la même occasion le festival que l'Opéra Comique proposait autour de cette oeuvre vénitienne, pur joyau qui aura enchanté notre hiver glacial de mille et un reflets.

 

C'est un récital "Autour de Venise, berceau de la musique italienne", avec deux des chanteurs d'Egisto, - Marc Mauillon qui en tient le rôle titre avec oh combien de panache et Isabelle Druet qui en est une bouleversante Climène) qui en refermait cette semaine si intense en découvertes.

 

Ils étaient accompagnés de deux musiciens du Poème Harmonique, Angélique Mauillon à la harpe et François Guerrier au Clavecin. Le programme était composé de cantates sacrées et de madrigaux, illustrant la vie musicale qui animait les églises et les salons à cette époque de grande effervescence, où y naît l'opéré public, dans la première partie du XVIIe siècle.

 

Les compositeurs retenus en dehors des Caccini père et fille, ont tous participé de près ou de loin à la création de cet opéra public et à cette vie musicale au coeur de la Sérénissime : de Claudio Monteverdi à Pier Francesco Cavalli, à Tarquinio  Merula en passant par Barbara Strozzi et Benedetto Ferrari. C'est aux Caccini, et tout particulièrement à Giulio le père, que nous devons tout simplement les réflexions sur la monodie accompagnée, qui furent à l'origine de l'opéra, à Florence, au tournant des XVIe et XVIIe siècle. Il participa aux travaux d'une académie, la Camera Bardi, qui en quête d'un retour à l'idéal de la tragédie grecque, étudia les rapports étroits entre la poésie et la musique. Il composa ce qui passe pour le premier opéra de l'histoire en 1600 : Euridice.

 

Nous avons vécu grâce à deux artistes des instants de pure poésie musicale. Les choix des pièces interprétées, y compris pour la harpe de Giiovani Maria Trabaci et pour le clavecin de Girolamo Frescobaldi, composait un harmonieux équilibre permettant à chacun de nous d'être ravi loin du quotidien, dans un univers onirique et parfois si cruel, aux sombres beautés. Le texte et la musique nous y disent combien l'amour n'est jamais qu'un jeu de dupes, entre songe au dolorisme sensuel et lumière d'un sourire, ou d'un rire qui vient ranimer la flamme.

 

Marc Mauillon une fois de plus y révèle combien son timbre unique parvient à colorer)les affects. Poignant et charmeur, insolent et moqueur, il est un acteur et un baryton aux multiples facettes. Son phrasé et sa projection si intense dans "Dormo ancora" de Claudio Monteverdi ou dans "Qual Vision l'alma m'abbaglia ?" de Pier Francesco Cavalli, lui permettent de nuancer ce rêve où se révèle la fragilité des héros. Les mots qu'il murmure nous étreignent dans toute la puissance des tourments qu'ils dévoilent. IsabelleDruet-bio-web

 

Isabelle Druet est une tragédienne dont aussi bien le jeu, que le timbre, aux graves déchirants et aux aigus si fulgurants, nous chavirent dans le "L'agrime mie" ou le "Voglio Morire", tous deux de Barbara Strozzi.

 

Tous deux se jouent du recitar cantando avec une technique parfaite. les duos fonctionnent à merveille. La complicité entre les deux chanteurs leur permet de nous offrir des instants espiègles aux charmes mutins, comme dans ce bis aux éclats de rire aussi fous que l'amour : "Folle è ben" de Tarquinio Merula.

 

A la harpe, Angélique Mauillon offre grâce et volupté, déchirements et larmes, tandis que François Guerrier au clavecin est lumière et énergie.

 

  © Caroline Doutre

 

Entre ombre et lumière, l'amour est ici folie et désenchantement, jeu cruel et songe trompeur mais sans lequel on ne sait vivre.

 

Un superbe récital tout en émotion, dont on espère qu'il pourra être redonné. La splendeur de la musique vénitienne nous a ici été révélée par des artistes de coeur.

 

Par Monique Parmentier

 

egisto-tyo-festival

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