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Le blog de Susanna Huygens

Away! away! for I will fly to thee

23 Juillet 2024 , Rédigé par Parmentier Monique Publié dans #Poésie et Littérature

@ Photo M. Parmentier - La vita nuova

« On that first morning when the sky was blue again Mary wakened very early. The sun was pouring in slanting rays through the blinds and there was something so joyous in the sight of it that she jumped out of bed and ran to the window. She drew up the blinds and opened the window itself and a great waft of fresh, scented air blew in upon her. The moor was blue and the whole world looked as if something Magic had happened to it. There were tender little fluting sounds here and there and everywhere, as if scores of birds were beginning to tune up for a concert. Mary put her hand out of the window and held it in the sun. »

@ Photo M. Parmentier - La vita nuova

« A l’aube du premier jour qui vit revenir le beau temps, Mary se réveilla de bonne heure. Le soleil filtrait dans la chambre à travers les fentes des volets, et ce spectacle était si joyeux qu’elle s’élança hors de son lit et courut jusqu’à la fenêtre. Elle l’ouvrit, poussa les volets et un grand souffle d’air frais et parfumé l’enveloppa. La lande resplendissait de toutes les nuances de bleu, comme si un enchanteur avait, pendant la nuit, métamorphosé le paysage. De doux chants d’oiseaux résonnaient dans l’air matinal, tous différents, tels des instruments s’accordant avant un concert. Elle tendit la main et sentit la caresse du soleil ». Traduction pour Folio Junior d’Antoine Lermuzeaux /Secret garden de Frances Hodgson Burnett (1849-1924)                                               

@ Photo M. Parmentier - La vita nuova

Depuis mon dernier article, d'autres livres, plus beaux les uns que les autres me sont arrivés. De Tristan & Isoulde et la Vita Nuova de Dante illustrés tous deux par Evelyn Paul (1883-1963), en passant par le Royaume de la Perle illustré par Edmund Dulac (1882-1953) et des Poèmes sur la nature (Nature Poems) de Percy Bisshe Shelley (1792-1822) illustrés par William Hyde (1858-1925), Wonderbook de Nathaniel Hawthornes (1804-1864) illustré par Arthur Rackham (1867-1939) tous ont été des moments bonheur, lorsque j’ai ouvert les enveloppes les contenant. Je n’étais pas partie pour m’arrêter en chemin, mais en feuilletant le dernier arrivé, j’ai eu envie de faire une pause jusqu’à la rentrée (mettant ainsi à profit ces mois de difficultés dans les transports provoqués par les JO), pour m’interroger sur le sens que je souhaitais donner à cette collection, partie d’un défi personnel, mais dont chaque nouvel album venait à me rappeler, une quête qui sommeillait en moi depuis de longues années.

@ Photo M. Parmentier - Tristan & Isoude

Certains penseront que durant mes séjours musicaux à Fontfroide, j’en avais trouvé la voie. Mais ce n’est que maintenant que je réalise, à travers mes souvenirs, qu’effectivement, je m’en suis rapprochée, les jardins et la musique m’en offrant des fragments, des chemins à suivre.

C'est à la lecture d'un livre dont je n'ai pu encore acquérir la première version illustrée par Charles Robinson (1870-1937), c’est un de mes projets, que je me suis souvenue de ce qui me guidait depuis tant d'années, dussè-je passer auprès de bien des gens pour une « neuneu ». Secret Garden, m'a ramené vers des souvenirs d’enfance qui me reviennent toujours tels que je les ai perçus dans un jardin, il y a bien longtemps. La nature, le jardin, les vents, les parfums, les couleurs, la lumière, ma quête est celle de la poésie et de la musique du monde.

@ Photo M. Parmentier - Tristan & Isoude

Mes souvenirs et ma quête sont liés, intenses et vivants : des faisceaux de lumière, un monde vaporeux, « bleue comme l’ombre des arbres sur l’herbe » (Henri de Régnier), perlé de scintillements qui reflète la douceur du chant des oiseaux, aux robes-atmosphères comme dans Peau d’âne. Un univers tour à tour translucide et opaque, un jeu de nuances dans les paysages où le regard s'abîme. Redevenir ce que je n'ai pas été mais rêvait d'être en regardant la lumière jouer avec les ailes de myriades d'insectes, au-dessus de cet étang qui s'évanouissait dans l'horizon. Un songe qui s'emparait de mes paupières lourdes d'un sommeil pailleté d’azur et d’or. Une étincelle de songe et d'harmonie. Ce qui pour moi donne sens, est cet émerveillement que je ressentais en rêvant face à l’horizon d’une campagne aujourd’hui disparue, promesse de mondes beaux et généreux, vibrant et mélodieux, « rayonnant d’une surnaturelle clarté ». (Jean Lorrain – 1855/1906).

@ Photo M. Parmentier - Tristan & Isoude

Ce qui me frappe chez certains illustrateurs, ceux qui me touchent, c’est ce sentiment d’un pinceau léger comme un souffle qui m’invite, encore et toujours, à m’émerveiller. Certaines des œuvres illustrées sont-elles – mêmes de véritables joyaux littéraires, d’autres appartiennent à une littérature aujourd’hui délicieusement suranée, au style empesé et aux références si, -trop-, modernes à leur époque, qu’elles ne nous « parviennent » plus, ne nous parlent plus. Etrangement, les illustrations elles leur insufflent une nouvelle vie et nous donnent bien souvent envie de les imaginer telles qu’elles devraient être pour devenir intemporelles. Ce sont les illustrations d’Edmund Dulac qui font d’un texte de présentation sur le monde de la perle, un conte de nacre et d’ivoire, aux princesses d’ambre et d’ivresse. L’illustrateur y est le ciseleur qui transcende un objet et ses mythes, en conte joyau.

@ Photo M. Parmentier - Le Royaume de la perle

Me revient en mémoire ces mots d’un critique d’art : « … tout leur mystère, la rêverie qu’ils comportent, l’infini qui les enveloppe, les correspondances intimes et insaisissables qu’ils ont entre eux », voici ce qui m’émerveille.

Dans les jardins secrets murmurant, si souvent illustrés par Charles Robinson, dans ces mondes enluminés d’Evelyn Paul, dans ces personnages si vibrant de Florence Harrison, je me sens chez moi… à l’horizon, dans ces ailleurs rêvés. Découvrir grâce à une spécialiste de Shelley tout l’amour de ce dernier pour la nature, devenu une source d’inspiration pour de nombreux illustrateurs, dont les horizons flamboyants, fulgurants de William Hyde, mais aussi les roses de velours au parfum captivant de Charles Robinson, m’ont progressivement ramené à ces instants de « silence » bourdonnant et contemplatif de mon enfance. A ces émerveillements qui me permettait de ressentir le monde, dans mon jardin clos de murs anciens.

@ Photo M. Parmentier - Le Royaume de la perle

Les illustrateurs que je découvre font vibrer les mots des poètes de couleurs nouvelles, ouvrant de nouvelles perspectives.

Mon Secret garden est un jardin de roses et de jasmin, mais aussi un potager aux carrés parfaitement dessinés, promesses de saveurs gourmandes aux couleurs d’été ou aux goûts plus prononcés de l’hiver.

@ Photo M. Parmentier - Le Royaume de la perle

Mon Secret garden, est un jardin anglais, clôt, débouchant sur une maison ou un manoir ancien, d’où pourraient surgir des dames et chevaliers, des sorcières et sorciers, des hobbits ou des elfes… un monde de fantasy, où l’imagination est laissée libre, sans les moqueries d’un monde adulte où règne l’ennui de bon aloi prenant la pose de l’intellectuel fatigué, cartésien ou … freudien.

@ Photo M. Parmentier - Hawthornes Wonderbook

Le temps qui passe y est nimbé de lumière, je m’y installe pour lire, tout en laissant mon regard vagabondé et mes livres anciens y auraient pour étagère des branches d’arbres noués.

A la rentrée, à mon retour du sud, je reprendrais mes promenades, en quête de quelques livres et probablement viendrais je enfin à travailler, sur ce journal d’un autre temps, celui où petit à petit, avant que de partir, je consignerai ces petits riens, qui font tout le sel de la vie. Ces petits riens qui sont composés des mêmes atomes qui me font, atomes qui un jour repartiront en quête d'une nouvelle étoile.

Par Monique Parmentier

@ Photo M. Parmentier - Hawthornes Wonderbook

« Souvenez-vous. Voici le printemps. Nous allons
Prendre ce vert chemin. Il conduit au vallon
Et passe près de la fontaine
Qui murmure tout bas et jamais ne se tait,
Et dont le jeune avril en averses a fait
Déborder la vasque trop pleine.

Nous avons tout un jour pour marcher devant nous,
Tout un jour ! … »

Henri de Régnier (1864 – 1936)

 

@ Photo M. Parmentier - Hawthornes Wonderbook

But I, being poor, have only my dreams;
I have spread my dreams under your feet;
Tread softly because you tread on my dreams.

 

Mais (tant je suis pauvre) je n’ai que mes rêves
J’ai répandu mes rêves à tes pieds
Marche légèrement : tu marches sur mes rêves.

William Butler Yeats (1865-1939)

 

@ Photo M. Parmentier - William Hyde

Since my last article, other books, each more beautiful than the other, have arrived. From Tristan & Isoulde and Dante's Vita Nuova both illustrated by Evelyn Paul (1883-1963), through the Kingdom of the Pearl illustrated by Edmund Dulac (1882-1953) and Nature Poems by Percy Bisshe Shelley (1792-1822) illustrated by William Hyde (1858-1925), Wonderbook by Nathaniel Hawthornes (1804-1864) illustrated by Arthur Rackham (1867-1939) all were happy moments, when I opened the envelopes containing them. I hadn't set out to stop along the way, but while leafing through the latest arrival, I wanted to take a break until the start of the school year (thus taking advantage of these months of transport difficulties caused by the Olympics ), to question myself about the meaning I wanted to give to this collection, part of a personal challenge, but of which each new album came to remind me, a quest that had been dormant within me for many years.

@ Photo M. Parmentier - William Hyde

Some will think that during my musical stays in Fontfroide, I had found the way. But it is only now that I realize, through my memories, that I have indeed come closer to it, the gardens and the music offering me fragments, paths to follow.

It was while reading a book of which I have not yet been able to acquire the first version illustrated by Charles Robinson (1870-1937), it is one of my projects, that I remembered what had guided me since so many years, even if I had to pass by many people as a “neuneu”. Secret Garden, took me back to childhood memories that always come back to me as I saw them in a garden, a long time ago. Nature, the garden, the winds, the perfumes, the colors, the light, my quest is that of the poetry and music of the world.

@ Photo M. Parmentier - Tristan & Isoude

My memories and my quest are linked, intense and alive: beams of light, a vaporous world, “ bleue comme l’ombre des arbres sur l’herbe » ” (Henri de Régnier), beaded with sparkles which reflect the sweetness of the song of the birds, with atmospheric dresses as in Peau d'âne. A universe by turns translucent and opaque, a play of nuances in the landscapes where the gaze is lost. To become again what I was not but dreamed of being while watching the light play with the wings of myriad insects, above this pond which vanished into the horizon. A dream that took possession of my eyelids, heavy with a sleep glittering with azure and gold. A spark of dream and harmony. What gives meaning to me is the wonder I felt while dreaming of the horizon of a countryside that has now disappeared, the promise of beautiful and generous worlds, vibrant and melodious, “ rayonnant d’une surnaturelle clarté  ”. (Jean Lorrain – 1855/1906).

@ Photo M. Parmentier - Tristan & Isoude

What strikes me about certain illustrators, those who touch me, is this feeling of a brush as light as a breath which invites me, again and again, to marvel. Some of the illustrated works are – even real literary gems, others belong to a literature that is deliciously outdated today, with a starched style and references so, -too-, modern in their time, that they do not remind us no longer reach us, no longer speak to us. Strangely, the illustrations breathe new life into them and often make us want to imagine them as they should be to become timeless. These are the illustrations of Edmund Dulac which make a presentation text on the world of pearls, a tale of mother-of-pearl and ivory, with princesses of amber and intoxication. The illustrator is the engraver who transcends an object and its myths, into a jeweled tale.

These words of an art critic come to mind: “… tout leur mystère, la rêverie qu’ils comportent, l’infini qui les enveloppe, les correspondances intimes et insaisissables qu’ils ont entre eux ”, this is what amazes me.

@ Photo M. Parmentier - Vita Nuova

In the whispering secret gardens, so often illustrated by Charles Robinson, in these illuminated worlds of Evelyn Paul, in these vibrant characters of Florence Harrison, I feel at home... on the horizon, in these dreamed elsewhere. Discover, thanks to a Shelley specialist, all of the latter's love for nature, which has become a source of inspiration for numerous illustrators, including the flamboyant, dazzling horizons of William Hyde, but also the velvet roses with their captivating scent of Charles Robinson, gradually took me back to those moments of buzzing, contemplative “silence” from my childhood. To these wonders which allowed me to feel the world, in my garden enclosed by ancient walls.

The illustrators I discover make the words of poets vibrate with new colors, opening new perspectives.

My Secret garden is a garden of roses and jasmine, but also a vegetable garden with perfectly designed squares, promises of gourmet flavors in summer colors or the more pronounced tastes of winter.

@ Photo M. Parmentier - Vita Nuova

My Secret garden, is an English garden, enclosed, leading to an old house or manor, from which ladies and knights, witches and wizards, hobbits or elves could emerge... a fantasy world, where the imagination is left free, without the mockery of an adult world where normal boredom reigns, taking the pose of the tired intellectual, Cartesian or... Freudian.

The time that passes is shrouded in light, I sit there to read, while letting my gaze wander and my old books would have knotted tree branches as shelves.

At the start of the school year, on my return from the south, I would resume my walks, in search of a few books and probably I would finally come to work, on this diary from another time, the one where little by little, before leaving, I will record these little things, which make all the spice of life. These little nothings which are composed of the same atoms which make me, atoms which one day will leave in search of a new star.

 

« Souvenez-vous. Voici le printemps. Nous allons
Prendre ce vert chemin. Il conduit au vallon
Et passe près de la fontaine
Qui murmure tout bas et jamais ne se tait,
Et dont le jeune avril en averses a fait
Déborder la vasque trop pleine.

Nous avons tout un jour pour marcher devant nous,
Tout un jour ! … »

Henri de Régnier (1864 – 1936)

 

But I, being poor, have only my dreams;
I have spread my dreams under your feet;
Tread softly because you tread on my dreams.

Mais (tant je suis pauvre) je n’ai que mes rêves
J’ai répandu mes rêves à tes pieds
Marche légèrement : tu marches sur mes rêves.

William Butler Yeats (1865-1939)

@ Photo M. Parmentier

 

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