La rose blanche des Elisyques
Elle est là, solitaire, dans cette cour, à l’ombre d’un mur au rouge pastel, qui donne sur une place baignée de lumière. S’interpose entre elle et moi, un long cyprès et un tout jeune olivier.
Elle est là, tout blanche, semblant comme alourdie par sa tige trop fragile.
Elle est là, si solitaire que sa solitude me répond. Elle est là et m’interpelle, retient mon regard, au point que j’ai du mal à quitter la fenêtre où je me tiens.
Que cherche t-elle à me dire ? Que me dit -elle ? Qu’évoque t-elle en moi, si ce n’est un instant d’une infinie beauté, souvenir d’un instant unique, qui me revient de si loin, qu’il ne parvient à se concrétiser que dans les larmes qui me viennent ?
Je suis là, au pays des Elisyques, cette peuplade d'origine indo-européenne, si bien nommée et qui a depuis longtemps disparue. M’évoque t’elle un instant, d’un temps lointain où je fus si heureuse que le réel n'est plus qu'une illusion. La couleur si profonde du mur qui vient rehaussée cette blancheur, participe-t-elle également au voyage auquel elle m’invite.
Chère Rose blanche, tu étais là et j’étais là, mais j’ai du repartir, alors que fanée tu n’étais pas encore. Ton souvenir m’obsède encore, alors que le brouillard d’un automne glacial s’est abattu sur la région parisienne où je suis revenue, me demandant ce que je fais là et quel sens donner à tout cela.
Car je sais qu’un sens il y a et que je dois libérer ma mémoire du poids du présent et d’un passé trop récent, pour me ramener à ce temps jadis, où le bonheur a exhalé de ton parfum.
Tu me manques chère Rose blanche, tu me manques, comme la présence qui émane de toi.
Reenchanter le monde
« Les humains doivent enfin se réveiller, et prendre « conscience de leur inconscience » s’ils veulent perdurer, retrouver une manière juste d’habiter la terre et réenchanter le monde. » Pierre Rabhi, La convergence des consciences.
Dixit Dominus par Jordi Savall, vertigineux
Odb Opéra, vient de publier ma chronique du CD Dixit Dominus par Jordi Savall...
Antonio Vivaldi (1678-1741) Dixit Dominus RV 595.
Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791). Dixit et Magnificat. KV 193.
Georg Friedrich Handel (1685-1759) Dixit Dominus HWV 232
Marta Mathéu, soprano I ; Hanna Bayodi Hirt, soprano 99, Anthony Roh Costanzo, contreténor ;
Makoto Sakurada, ténor ; Furio Zanasi, baryton. La Capella Reial De Catalunya. Le Concert des Nations. Direction Jordi Savall
1 cd Alia Vox. Durée 68’45. Livret Français/Anglais/Castillan/Catalan/Allemand/Italien. Enregistrement réalisé en direct à l’Auditori de Barcelone le 1er juin 2015.
Les trois œuvres ici retenues ont souvent été l’occasion pour les artistes de démontrer leur virtuosité, tant elles semblent a priori faites pour cela.
Depuis toujours, Jordi Savall associe, comme un certain nombre de grands interprètes, l’émotion à la virtuosité, mais avec cette touche humaniste profondément généreuse qui à chaque fois nous offre un regard nouveau sur ces œuvres archi-connues. Un regard dans lequel s’entrecroisent la beauté et la bonté, la générosité et le partage, la passion et la sérénité, la splendeur et l’humilité, le plaisir vivant et vibrant de la musique et du chant. Tous ces qualités que l’on retrouve ici, par delà l’objet matériel qu’est le CD, font de ce nouvel enregistrement, une véritable Offrande musicale.
Il s’agit ici d’un concert enregistré à Barcelone en 2015, auquel ont participé les élèves de la cinquième académie de la Chapelle royale de Catalogne.
Les plus grands compositeurs ont mis en musique ce texte d’un psaume particulièrement ancien, qui a pris dans la chrétienté une importance toute particulière, le psaume 110 de David. Il fut composé au IIe siècle avant Jésus-Christ lors d’une révolte des juifs contre les Séleucides, un peuple originaire de Mésopotamie. Il s’agit d’un texte belliqueux où le Seigneur promet sa protection contre l’anéantissement de ce peuple ennemi. La Contre–Réforme s’y est particulièrement intéressée, car il pouvait exprimer avec force, la colère de l’Église catholique contre la Réforme protestante. Ainsi, nombreux furent les compositeurs qui le mirent en musique. De Monteverdi à Buxtehude, en passant par Alessandro Scarlatti, Porpora, Charpentier, mais aussi les trois compositeurs qui sont ici retenus : Vivaldi, Mozart et Haendel. Le Dixit Dominus est donc avant tout à la fois une œuvre dramatique et flamboyante, alliant tout à la fois des effets tragiques et de virtuosité vocale, à une sensualité toute baroque. La méditation qui pourrait en paraître absente, y figure pourtant, dans des dialogues subtils entre instruments et solistes vocaux dont Jordi Savall si bien entouré, fait sourdre l’infini suavité.
Les trois Dixit Dominus retenus par le maestro catalan, nous conduisent, nous portent et nous emportent toujours plus loin, plus haut, tout au long de l’écoute. Le plaisir et le bonheur surgissent à chaque instant. Les interprètes chanteurs et musiciens, sous la direction ardente et précise, tourbillonnante et généreuse du maestro catalan, apportent un véritable souffle à ces œuvres. Ici tout irradie, flamboie. La soierie orchestrale, aux cordes si chatoyantes, répond à la beauté tout à la fois si dramatique et si riche du chœur. Les mots portent, foudroient, élèvent. Les cinq solistes sont tout simplement merveilleux de sensibilité et de maîtrise. Ils dialoguent avec l’orchestre avec une volupté qui nous fait tressaillir tout au long de l’écoute. Dans l’Aria Virgam Virtuatis, que ce soit chez Vivaldi entre les deux violoncelles et les soprani chez Vivaldi ou chez Haendel entre le contre-ténor avec un seul violoncelle, on est captivé par ce don de soi, par la poésie qui émane de ce tête-à-tête entre l’instrument et le chanteur. Le phrasé si onctueux et élégant des instrumentistes répond à la diction soignée et aux vocalises célestes des chanteurs.
Les timbres des cinq solistes, -les deux sopranos, Hanna Bayodi Hirt et Marta Mathéu, le contre-ténor Anthony Roh Costanzo, le ténor Makoto Sakurada et le baryton Furio Zanasi - se complètent parfaitement. Sensuels et fruités (si extatique et doloriste De Torrente in via bibet de Haendel des sopranos et du choeur), nobles et divins, ce sont des timbres dont la beauté participe à la palette des couleurs si luxuriante de cet enregistrement. Tous les cinq, comme le chœur, font preuve d’un engagement et d’une ferveur qui emporte notre adhésion, soulignant dans le Dixit Dominus de Mozart, des ombres incandescentes, à l’orée du romantisme.
On ne peut que vous conseiller ce splendide enregistrement du Maestro catalan, qui efface le temps de l’écoute toute anxiété, et vous ouvrira les portes d’un infini dansant et miroitant, entre ombre et lumière, vertigineux.
Monique Parmentier
A ma grand-mère... et à ses rêves d'enfant
Dans le regard de cette petite fille, il y a tant de moi. Née en 1908, dans une famille aisée, elle semblait promise à une vie tracée, équilibrée et sans gros soucis... cette petite fille, c'est en fait ma grand mère. Elle ne nous a jamais parlé de ses rêves d'enfants, ni des raisons de ce regard mélancolique. Mais ses rêves silencieux me sont familiers. C'est cette enfant que je connais ... et cette grand-mère à laquelle j'aimerais dire tout mon amour, est désormais et à jamais une enfant. Le temps passe si vite. Je me dis en te regardant que tu es là près de ta maman pour toujours et pas si loin de nous. Merci ... merci à toutes deux ... merci de m'avoir donner la possibilité de vivre certains de vos et de mes rêves et d'avoir pu poursuivre la route. Mille e mille volte grazie
Par Monique Parmentier