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Le blog de Susanna Huygens

Ambronay : une oasis musicale

23 Septembre 2012 , Rédigé par Parmentier Monique Publié dans #Chroniques Concerts

visuel-copie-1.jpgSe rendre à Ambronay, c'est se rendre dans un îlot de verdure, quelque part en un lieu intemporel, mélange d'hier et de demain, entre un ici et un ailleurs celui d'un univers où le TGV nous mène et celui d'une abbaye plus que millénaire, où la musique est reine.

 

Chaque automne, en ce lieu si magique résonnent des musiques que l'on dit anciennes, mais aussi du jazz et de la musique du monde, des musiques que l'on dit romantiques ou contemporaines. Pour sa 33ième édition, le Festival d'Ambronay a retenu le thème des Métamorphoses.

 

Pour le samedi de ce second week-end - sur les quatre que compte le festival - nous avons suivi deux concerts aussi différents et passionnants l'un que l'autre. Certes ils ont un commun de nous laisser le sentiment d'un inabouti, mais avec la certitude que c'est justement ce qui fait le bonheur du spectacle vivant.

desmarets_groupe_Bertrand-Pichene.jpegL'une des plus belles réalisations d'Ambronay est son Académie et tout particulièrement les "résidences jeunes ensembles". Ainsi sont accueillis de jeunes artistes, à l'avenir prometteur mais incertain. Ils trouvent ici auprès d'Alain Brunet et de ses équipes tout un environnement qui leur permet non seulement de progresser dans leur art, mais également d'être entourés et conseillés afin de se préparer à un contexte économique dans lequel être un artiste demande une préparation rigoureuse à l'insertion professionnelle.

Et avant même le concert de 17 heures, certains musiciens de l'ensemble qui devait nous offrir leur première carte blanche, l'Ensemble Desmarets, ont offert aux promeneurs de la visite accompagnée des lieux des surprises musicales. Ainsi les violes de gambes ont fait vibrer les voûtes plusieurs fois séculaires de l'abbaye bénédictine de leur chant mélancolique et automnal.

contre_tenors_Bertrand-Pichene.jpegNous les avons retrouvés ensuite en concert. Sur un programme de musique anglaise du XVIIe siècle dédié à Purcell, nous avons eu le plaisir d'entendre de jeunes artistes passionnés et plein de fougue. Ils ont proposé au public un concert bien construit et préparé. Le résultat a été un moment radieux et riche d'espérance. Certes le continuo était un peu trop riche et l'un des contre-ténors - Damien Ferrante - encore en devenir. Mais en revanche, le second contre-ténor, Rodriguo Ferreira nous a enchanté, tant par sa présence que par sa diction soignée et par son timbre tout à la fois moiré et rayonnant. Dans Ode on the Death of Mr. Henry Purcell de John Blow, l'hommage à l'Orfeo Britannicus, a été grâce à lui un instant de réelle émotion. Mais il faut également souligner le talent des musiciens et tout particulièrement la sombre beauté des violes, le duo ludique et expressif des flûtes dans le bis extrait de Fairy Queen, le théorbe ardent. Tel le papillon sortant de sa chrysalide l'Ensemble Desmarets, semble avoir trouvé à Ambronay un accompagnement bénéfique, qui lui permet d'aborder l'avenir sereinement.

 

Patricia Petibon Bertrand PichèneLe concert du soir était consacré à un récital, intitulé Amour & Folie. Il était donné par la soprano Patricia Petibon qui fit ses débuts à l'Académie baroque européenne d'Ambronay en 1994. Retour aux sources pour cette dame qui depuis cette époque a offert au public à travers le monde tant de moments prodigieux. Aujourd'hui Patricia Petibon peut s'offrir le luxe de se faire plaisir par le biais du récital et le public venu nombreux pour l'entendre en a été ravi. Un vrai régal d'humour, de sens du théâtre, du don de soi. Que peut-on critiquer lorsqu'au fond ici c'est le bonheur de rire qui compte ? Jamais l'amour n'est vraiment tragique et d'ailleurs la pièce la plus triste un air extrait de l'opéra Arianna de Benedetto Marcello, qui d'après les notes du livret était la pierre d'angle du programme n'a pas été donnée.

 

Le concert était composé en deux partie, la première consacrée aux musiciens allemands et français (Johann Georg Conradi, Marc-Antoine Charpentier et Jean - Philippe Rameau) et l'autre à Antonio Vivaldi et Georg Friedrich Haendel. Difficile de toujours voir un lien entre les morceaux choisis, si ce n'est que d'amour ici il fut question.

 

ppetibon2.jpegPour ce qui est de la folie, elle fut douce sans aucune forme de douleur et si peu de tristesse. Certes quelques moments de grâce et d'émotion comme dans "Tornami a vagheggiar", ont bien émaillé ce programme, mais c'est avant tout dans un délire scénique que Patricia Petibon nous a emporté. Jouant avec les musiciens comme avec le public, elle nous séduit par cette présence unique, véritable tornade de joie. Les bruitages qu'elle réalise dans l'air de Charpentier "Sans frayeur dans ce bois", son petit chapeau rose dans l'air de la folie de Platée sont autant de petits détails soignés et surprenants. Vocalement en très grande forme, Patricia Petibon s'autorise donc des libertés qui participent aux spectacles, avec des prises de risque dont elle se sort avec panache mais parfois à la limite du bon goût. Le public en redemande bissant par deux fois l'artiste et les merveilleux musiciens de l'ensemble Amarillis qui sous la direction de la claveciniste si sensible Violaine Cochard l'on accompagnés avec énergie, délicatesse et drôlerie.

Traversant les vallées bourguignonnes sous un brouillard épais au lendemain de cette belle journée, il nous a semblé que le songe baroque avait métamorphosé nos vies, arrêtant le temps pour mieux le savourer.

Le festival d'Ambronay vous attend encore pour deux week-end qui s'annoncent fort riches. Je ne peux que vous recommander de vous y rendre, afin de laisser derrière vous ce qui vous tourmente. La musique peut transfigurer le temps.

 

Par Monique Parmentier

 

Le festival d'Ambronay

 

Crédit photographique : Ensemble Desmarets et Patricia Petibon©Bertrand Pichène

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